L'homme ne peut guérir du désir, et il ne peut se transformer magiquement en un Tiers divin de parole qui produirait dans chaque énonciation un consensus définitif avec lui-même, les autres et le monde. Moteur essentiel de sa vie mentale et psychique, le désir permet à l'homme de s'orienter dans le monde. Tout projet de neutralisation prophylactique du désir s'avère par conséquent vain, et voué à être démasqué comme désir de lui-même. Exister pour l'homme, c'est exister comme être de désir. Toutes ses connaissances et ses institutions sont ainsi ramenées à ce qu'elles ont toujours été : de pures et simples projections pulsionnelles. L'entreprise inédite de reconstruction anthropobiologique du désir qui est tentée ici nous contraint à reconnaître cette seule vérité : l'homme ne peut s'élever au-dessus de la réalité pour la connaître dans son essence profonde, comme il ne peut comme locuteur s'identifier mentalement à son allocutaire, pour le contraindre à se reconnaître dans un consensus, abstraction faite de ses désirs, de ses croyances et de ses intentions d'agir. Il doit donc s'en remettre au dialogue dont il découvre ainsi l'enjeu anthropologique.